Ce début de reprise de notre activité est marquée, frappée pourrait-on dire, par le départ de notre groupe de Patrick Ceccon, notre président adjoint. Départ autant inattendu que brutal, sans véritable explication. Cela nous renvoie évidemment à nous-mêmes et à ce que la Société psychanalytique de Tours propose ou peut devenir, nous décidons de réfléchir ensemble aux interrogations que cela suscite profondément pour nous tous.

D’abord, les Journées de Tours sans Patrick Ceccon sont inenvisageables !
Nous les annulons donc.
Nous décidons de proposer, une fois par trimestre des Journées d’études, moins difficiles à organiser.

De même nous sommes renvoyés à cette question récurrente : nous sommes une Société psychanalytique, alors ne faudrait-il pas penser ce « psychanalytique » en terme de clinique ? Notamment ne pourrait-on pas envisager un groupe dans le groupe qui proposerait des réflexions « cliniques » ?
Bien-sûr, si certains s’y emploient pour mettre en œuvre cette proposition, cela peut tout à fait être une nouvelle orientation.

Cela dit, dès les origines de sa création, dès ses commencements, la Société Psychanalytique s’est voulu orientée vers une démarche entremêlant psychanalyse et philosophie.
N’est-ce pas en effet, la philosophie qui permet de réfléchir et de penser dans un en-dehors de ce qu’elle étudie ?
Cette place là, n’est-elle pas celle qui permet le mieux de se distancier et de repenser le terme même de place ? Notamment : quelle est la place de la psychanalyse dans la société d’aujourd’hui ? Quelle est la place du « soignant » face au « patient », dans les institutions et en-dehors des institutions ?

Alors, ne faudrait-il pas revendiquer encore plus fortement notre orientation philosophico-politique en allant jusqu’à clairement re-nommer notre Société ?
Un nom qui afficherait explicitement notre spécificité à la fois philosophique, psychanalytique et politique ?

De même dans le registre de la place, nous décidons de nous interroger ce samedi sur le paradoxe qu’il y aurait à exister dans une collégialité sans hiérarchie, sans bureau, sans chef et la nécessité qu’il y ait un « guide » pour qu’un groupe puisse se penser en tant que tel. Un guide intellectuel, notamment. Freud lui-même affirme la nécessité d’un tel « dirigeant » pour guider les communautés. Il parle notamment, dans sa lettre sur la guerre à Einstein, d’une « dictature de la raison » qui serait incontournable pour pouvoir envisager l’idée même de paix.

Nous pensons à partir de ce paradoxe à la notion de héros.
Qu’est-ce qu’un héros ? N’est-ce pas d’abord une figure tragique de la littérature ? À la fois rebelle et fragile, il témoigne d’une sorte de romantisme à l’œuvre, notamment en ce qu’il se pense à la marge, contre les institutions. Il est à la fois pathétique et sublime. Sublime parce que visionnaire et ayant le sens du dépassement, mais en même temps confronté à des échecs et à une solitude perpétuelle.
Une figure alliant l’énergie et la mélancolie. Peut-être est-ce grâce à ce mélange qu’on lui emboite le pas, qu’il est considéré aussi comme un guide ?
Nous pensons à Œdipe, à Julien Sorel, à d’Artagnan, à Georges Sand, à Éros…
Alors cette figure du héros existe-t-elle encore aujourd’hui ? Dans la mesure où notre époque est particulièrement tragique, loin d’une sorte de nirvana qui serait terne et fade, il semble que le héros soit plus que jamais attendu !

Nous proposons également de réfléchir à réhabiliter un lieu d’hospitalité à Tours.
Lieu dans lequel il y aurait des cliniciens qui seraient susceptibles d’accueillir le passant, quiconque passerait. Cette idée également présente à l’origine de la fondation de la Société Psychanalytique de Tours supposait d’accueillir de façon inconditionnelle - ou tout au moins en un inconditionnel qui pense ses conditions -, d’accueillir donc, toute demande autour du désarroi et de la misère. Il s’agirait de penser « le soin » dans un rapport « immédiat » à « la rue ».
Là encore se pense l’idée d’une institution hors institution, hors cadre. Un hors institution à l’image de ce qu’a pensé Derrida en un autre registre, lorsqu’il a fondé le Collège International de Philosophie. C’est pourquoi, pour installer ce lieu d’hospitalité, il faudrait un autofinancement.