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HOMMAGE à Michael TURNHEIM

C’est avec tristesse que nous vous faisons part de la disparition de Michael TURNHEIM qui fut depuis le lancement des Journées de Tours un compagnon fidèle et un ami de la Société Psychanalytique de Tours.

Chacun de nous se souviendra de ses participations régulières comme orateur principal ou comme discutant aux Journées de Tours. Nous nous souviendrons tout particulièrement de sa magnifique intervention en 2007 interrogeant les rapports secrets entre Bataille et « le Lacan classique » sous l’auspice de la pensée de Jacques Derrida dont il était un lecteur attentif au nom de la Psychanalyse. Ainsi écrivait-il au début de ce dernier travail :

« Si l’on veut aller au-delà de la raison philosophique, il faut passer par le sommeil de la raison, « celui qui engendre et celui qui endort les monstres ». Il faut « avoir passé la nuit avec la raison, veillé, dormi avec elle : toute la nuit, jusqu’au matin, etc… ». Seulement après une telle nuit, on aura une chance « d’ouvrir l’œil », mais on ne saura jamais si le réveil est encore ruse du rêve, « c’est-à-dire encore de la raison ». On le voit, la nuit n’est plus ici, comme chez Goya, celle où la raison nous abandonne et nous expose aux dangers de l’imagination, mais celle dans laquelle la tradition métaphysique nous a plongés et dont nous voudrions nous réveiller, peut-être pour arriver à une autre raison….. L’avenir de la psychanalyse, à partir de ce moment, dépend de la façon dont elle se réveille, et Lacan lui-même n’a peut-être rien fait d’autre, par la suite (après la publication des Écrits) que de chercher une sortie par rapport à sa propre grande affaire nocturne avec la raison ».

Eh bien, Michael, il nous faudra beaucoup de nuits avec ou sans la raison pour arriver à la convaincre que plus jamais tu n’arriveras à « ouvrir l’œil », à moins que la nuit qui est maintenant la tienne ne nous ouvre les yeux, une fois de plus, sur l’éphémère destinée de la condition humaine en nous maintenant éveillés à la vitalité de ton souvenir, à son intériorité vivante. Car, après ton départ, il nous reste toute la force de ta pensée, toutes ses représentations, toute la finesse et la subtilité de ta présence au monde, toutes les traces de ton combat pour que la pratique de la psychanalyse survive au « monstre » de la raison, maladie qui risquerait bien de l’emporter ne laissant derrière elle que le rêve de la pensée.

Pour toi, hier, comme pour nous aujourd’hui, ce deuil de la pensée est un deuil impossible et en mémoire de ce que fut ton combat, nous ne cesserons de travailler cette merveilleuse phrase de Derrida qui t’inspira tant de fois, soit : « le seul deuil possible est le deuil impossible ».


Francis CAPRON

Depuis Lacan, quelle direction pour la cure

Article paru dans les Cahiers de l’infantile 2008, Harmattan
Journées de Tours 2005

F. Hofstein, T. Beaujin, P. Ginésy, C. Talagrand, R. Major, F. Capron, M. Turnheim & F. Kaltenbeck (141 pages).
Editions A propos, Société Psychanalytique de Tours, Institut des Hautes Etudes en Psychanalyse.

Cet ouvrage collectif, réalisé avec beaucoup de soin, et d’une fort belle présentation, reprend les interventions qui ont eu lieu au cours de l’année 2005 à la Société Psychanalytique de Tours.

L’année 2005, comme l’on s’en souvient, a été marquée par des débats parfois violents, concernant le statut des psychothérapeutes et des psychanalystes qu’il s’agissait de réglementer (cf. le célèbre amendement Accoyer). C’est dans ce contexte que se sont déroulées ces journées, avec pour point de départ le texte de Lacan de 1960 sur « La direction de la cure et les principes de son pouvoir ». Selon Derrida, au fondement de ce discours se trouve « l’idéalité du signifiant », et « la vérité comme dévoilement » auxquels certains auteurs (F. Hofstein, R. Major et F.Capron) ajoutent la question de la lettre : la lettre volée bien sûr, mais aussi le désir qu’il faut prendre à la lettre.

Il est impossible de rendre compte de l’ensemble des articles, d’une rare qualité autant par leur densité que par leur érudition, dans lesquels l’apport de Lacan, souvent via l’œuvre de Derrida (M. Turnheim lui consacre une large part) est analysé sans complaisance, mais de manière très argumentée et non polémique. Il y est question de la langue, de la trace et du discours, de la métaphore et de la métonymie (C. Talagrand), des relations entre langue et musique (P. Ginésy), du transfert et de la résistance, celle du patient (F. Capron), mais aussi celles des psychanalystes et de la psychanalyse qui présenterait une maladie auto-immune (F. Kaltenbeck). Cette énumération ne vise en aucun cas à donner de cet ouvrage l’idée d’un inventaire à la Prévert, mais bien au contraire à inciter le lecteur à entrer dans ces articles et à y découvrir les multiples aspects autour desquels s’articule cette question essentielle de la direction de la cure aujourd’hui.

Marie-Claude Fourment

Lettre de la Société Psychanalytique de Tours à Monsieur Xavier Bertrand Ministre de la Santé et des Solidarités

Tours, le 15 Février 2006

Monsieur le Ministre,

Après concertation des membres titulaires de notre association, nous aimerions vous communiquer notre sentiment et nos prises de position suite à l’article 52 de la loi de santé publique du 9 août 2004.

  • Cette loi, bien que ne concernant pas directement l’exercice de la psychanalyse porte en elle-même une menace pour son libre exercice et cela d’autant que les associations du Groupe de contact revendiquent de l’assimiler aux psychothérapies.
  • Nous aimerions vous signifier de la manière la plus officielle notre opposition aux futurs décrets d’application de l’article 52, s’ils venaient à amalgamer de près ou de loin le statut de psychothérapeute à l’exercice de la psychanalyse. Les associations de psychanalystes du Groupe de contact ne représentent absolument pas la majorité des praticiens de la psychanalyse qui ont sur ce point d’autres points de vue. Nous allons même jusqu’à dire que les représentants des dites associations ne représentent qu’eux-mêmes puisque le débat et l’exercice démocratique semblent être totalement fermés concernant cette question.
  • Depuis le début, soit depuis Freud, la formation des psychanalystes s’est toujours appuyée à la fois sur une démarche personnelle et privée et sur un apprentissage aux savoirs qui viennent en complément de cette initiative personnelle. Aucune formation universitaire, si performante soit-elle, ne viendrait garantir davantage ce type particulier d’exigence qui se transmet depuis le commencement de la pratique analytique. Bien au contraire, nous pensons qu’elle risquerait d’en atténuer l’importance et la portée.
  • Dès le mois de mars 2004, plus de mille cinq cent signataires ont manifesté leur opposition d’abord à la loi, puis aujourd’hui, à ses décrets d’application. Ces expressions individuelles et personnelles additionnées sous les textes signés du « manifeste pour la psychanalyse » et « du front du refus » forment une opinion qui est ignorée jusqu’à ce jour par les pouvoirs publics. Nul doute que ces praticiens de la psychanalyse ne manqueront pas, le moment venu, de réclamer la suppression de cette loi et de ses décrets d’application.

Veuillez croire, Monsieur le ministre, en l’assurance de notre haute considération.

Pour le comité de direction

Le Président
Francis CAPRON

Déclaration à la préfecture d’Indre et Loire le 28 septembre 2005

Objet : Cette association s’inscrit dans le prolongement de l’œuvre de Freud.

  • Elle souhaite promouvoir l’exercice de la psychanalyse en tant que discipline indépendante de la médecine et des diverses formes de psychothérapies.
  • Elle se dotera, à court et moyen termes, des outils de formation et de réflexion jugés indispensables à la connaissance de la psyché.

Cette association a pour but :

  • De préserver l’indépendance et l’autonomie de l’exercice de la psychanalyse face aux asservissements de tous ordres qui menacent actuellement sa spécificité.
  • Concourir à la formation et à la réflexion de ceux qui pratiquent déjà la psychanalyse indépendamment de leur appartenance à une école ou à une institution psychanalytique déjà existante.

Elle s’adresse aussi à ceux qui désireraient acquérir les connaissances et la culture indispensables à l’exercice de cet art.

Enfin ses actions peuvent concerner un public plus large qui, s’intéressant aux manifestations de l’inconscient, pousserait la curiosité jusqu’à suivre les sessions de formation proposées par la Société.

La visée de l’Association est donc éminemment culturelle par la promotion et les exigences qu’elle définit pour la pratique de la psychanalyse. Elle tendra donc à rendre accessible la cure psychanalytique au plus grand nombre en inscrivant ses actions en résistance à l’oppression sociale et politique souvent relayée par les institutions soignantes existantes.

Siège social : 3 rue Marceau à Tours.
Date de la déclaration : 28 septembre 2005.

Articles parus :

  • La Nouvelle République du Centre-Ouest - 19 janvier 2006

Psychanalyse : deux journées de réflexion à Tours

  • La Nouvelle République du Centre-Ouest - 8 novembre 2006

Société psychanalytique

  • La Nouvelle République du Centre-Ouest - 31 janvier 2006

Formation psychanalytique

  • La Nouvelle République du Centre-Ouest - 2 octobre 2006