"Faire travailler la psychanalyse"

 

 

La philosophie est dans l'impossibilité de se refermer sur elle-même, dans la mesure où la pensée dont elle est animée ne parvient jamais, sans s'égarer, à dire le tout ou l'au-delà de l'être. Elle est donc sans cesse obligée de rabattre ses prétentions. Pour autant le philosophe est parfois arrogant de ses prérogatives et se croit puissant de sa raison. En fait, confronté à cette chose impossible à rejoindre (la compréhension claire et distincte de soi-même et le rapport entre soi et le monde), il reste convaincu, modeste ou fou. Car le sujet pensant et se pensant est séparé, divisé et ne peut se recueillir lui-même. Econduit de toute présence à lui-même, dérivant, incessamment ramené aux abords de la chose-même sans jamais pouvoir accoster, le sujet s'échoue sur les grèves de ses propres rivages, soumis au ressac de ses interrogations. De même, tourné vers le monde, il est tel un bateau qui malmènerait de ses remous la surface calme et limpide : inévitablement son sillage transforme les eaux. Doté de la puissance de la pensée il n'a pu finalement que provoquer le monde, lui faire rendre raison. Même à tenter de l'habiter, il n'a fait que le défier, l'abimant à force d'y laisser sa trace inconsidérément.

C'est au coeur de ces paradoxes-là que la psychanalyse, comme héritière irrévérencieuse, est venue enfin apporter la possibilité de travailler à une mise en évidence des vanités de notre pensée et cela par "une déconstruction de nos propres illusions et de celles de l'humanité" (Freud - Lettre à Romain Rolland du 4-3-1923, in S. Freud, Correspondances (1873-1939).

Or, une question demeure et qui nous occupera ici : dénoncer les illusions, poser le soupçon sur les ancrages métaphysiques de la pensée et leurs conséquences, subvertir l'idée de vérité en repérant les compromissions mensongères ou refoulés de la parole, tout cela suppose-t-il pas de se considérer encore comme doté d'un pouvoir de se surplomber soi-même, c'est-à-dire d'espérer un surcroît de lucidité sur soi (selon la philosophie), capable de dénouer l'insu alors même que le discours du maître aurait été démis de sa souveraineté (selon la psychanalyse) ?

Alors, n'est-ce pas à partir de cette question-là que pourraient s'interroger les tentations parfois hégémoniques sur le sujet et sur le monde, celles communes aux démarches de la philosophie ainsi que de la psychanalyse ? Ainsi rassemblées par une parenté indéfectible mais polémique, ne devraient-elles pas travailler l'une et l'autre à déconstruire sérieusement leurs intentions ?

Jean-Marie Vaysse, philosophe et auteur de L'Inconscient des modernes affirme ainsi : "Si la philosophie moderne a parlé de l'inconscient sans le savoir, la psychanalyse a fait de la philosophie sans le vouloir. Là où était le sujet moderne, l'inconscient devrait advenir ; là où est l'inconscient la philosophie doit revenir".

 

Catherine Kauffman.

 

Ce séminaire est ouvert au public.

Participation de 5 euros à chaque séance du séminaire.

 

Première séance du sémaire : le 6 Mars 2020

Lieu : 2  rue Paul-Louis Courier (à l'angle de la rue des Tanneurs) à Tours, de 20h30 à 22h30.